Pour défendre le maintien de l'envoi d'avertissements avant de prononcer des sanctions, la présidente de la Commission de protection des droits (CPD) de l'Hadopi rappelle que 95 % des e-mails envoyés aux abonnés restent sans suite. Seuls 5 % des abonnés avertis sont avertis au moins une deuxième fois. Mais peut-on en conclure une quelconque efficacité ?

Interrogée par nos confrères d'ElectronLibre, la présidente de la Commission de protection des droits (CPD) de l'Hadopi Mireille Imbert-Quaretta est revenue sur le bilan provisoire de la riposte graduée, dans son volet pénal.

Le mois dernier, la magistrate avait expliqué ne pas souhaiter que des amendes remplacent la suspension de l'accès à internet, pour éviter d'aboutir à un système  plus répressif que l'actuel. Aujourd'hui, elle précise que la CPD "estime qu’il serait dommage que le nouveau système fasse totalement l’impasse sur le coté pédagogique, car les échanges qu’elle a pu avoir avec les abonnés montrent que ceux-ci n’ont qu’une vision incomplète du fonctionnement d’Internet et du droit d’auteur". Il semble donc être envisagé avec sérieux de donner satisfaction à la Sacem qui demande des sanctions sans sommations.

Pour Mireille Imbert-Quaretta, les avertissements suffisent dans la plus grande partie des cas. "Avoir rappelé à plus d’un million de personnes que le droit de propriété était un droit constitutionnellement protégé ne m’apparait pas négligeable (…). Avoir obtenu que ces avertissements soient suivis d’effet, puisque 95% des personnes averties une première fois ne se voient plus reprocher de nouveaux comportements illicites, ne me semble pas être insignifiant", indique-t-elle.

Il y a cependant au moins trois possibilités pour expliquer que 95 % des avertissements ne donnent pas lieu à réitération :

  1. L'internaute concerné arrête effectivement tout téléchargement illégal et prend les mesures nécessaires pour ne pas que sa connexion puisse être utilisée pour pirater des oeuvres ;
  2. L'internaute concerné change de méthode de piratage et se réfugie vers les outils notoirement à l'abri de toute sanction : streaming, téléchargement direct, utilisation d'un VPN ou d'une seedbox domicilié à l'étranger, P2P sécurisé,…
  3. L'internaute concerné continue de télécharger et de partager des fichiers sur les réseaux P2P mais son adresse IP n'a pas fait l'objet d'un nouveau PV d'infraction dans les six mois impartis par la loi pour constater une réitération.

Seuls les chiffres de vente de contenus numériques permettront de constater l'effet éventuel de la riposte graduée. Et il ne faudra pas simplement constater une hausse ; il faudra qu'elle soit sensiblement plus forte que dans les pays comparables qui n'ont pas mis en oeuvre d'équivalent à l'Hadopi. Or pour le moment, aucun indicateur ne permet de le penser.

Enfin, Mireille Imbert-Quaretta revient sur la question des dossiers transmis aux parquets. Ce matin, nous rappelions que plus de 7 mois après la première transmission à un procureur, aucun dossier n'avait donné lieu à une condamnation. La présidente de la CPD le confirme implicitement en indiquant que "les parquets ne sont pas obligés de nous informer des suites qu’ils donnent à la transmission de nos dossiers", mais que "toutefois nous savons qu’un certain nombre ont diligenté des enquêtes puisque nous avons été saisis de demandes complémentaires par les services de gendarmerie".

Rappelons que dans une circulaire, la Chancellerie avait demandé en 2010 que les parquets évitent de diligenter des enquêtes.

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