Selon des fuites, le gouvernement britannique serait sur le point de proposer une nouvelle législation qui confierait quasiment tout pouvoir à l’exécutif en matière de propriété intellectuelle. Une fuite sans doute organisée pour mieux faire passer la riposte graduée.

Parmi les différentes techniques de manipulation mentale bien connues des commerciaux qui l’appliquent quotidiennement, on appelle ça un « porte-au-nez ». Elle consiste à émettre une première proposition que l’on sait totalement inacceptable, pour que l’interlocuteur accepte un compromis qu’il aurait autrement refusé. Par exemple, un commercial demande un prix de 100 pour obtenir un prix de 80 qui aurait été refusé en première intention. La technique est aussi couramment employée en politique. Lorsqu’un gouvernement sait qu’il aura du mal à faire accepter une mesure dans un projet de loi, la solution est d’organiser des fuites en laissant la presse se déchaîner contre une fausse mesure encore plus inacceptable, pour que la mesure initiale soit vécue par la population comme un compromis.

C’est ce que tente le gouvernement britannique à propos de la riposte graduée, qui revient sur le devant de la scène après avoir été repoussée. La Reine a appuyé la demande des lobbys du cinéma et de la musique, et selon des fuites relayées par Boing Boing, le secrétaire d’Etat Peter Mandelson s’apprêterait à proposer un projet de loi sur l’économie numérique (Digital Economy Bill) absolument inacceptable aux yeux de tout démocrate.

Le projet de loi autoriserait le Secrétariat d’Etat à effectuer n’importe quelle modification aux droits de propriété intellectuelle (droits d’auteur, marques, brevets…) par la simple voie réglementaire, sans le contrôle du Parlement. Il pourrait notamment créer de nouvelles peines telles despeines de prison pour le partage de fichiers, ou mettre en place la riposte graduée sans débat. De même, il pourrait concéder des prérogatives d’investigation aux ayants droit, qui auraient par exemple la possibilité d’exiger des FAI , des bibliothèques, des entreprises ou des écoles qu’ils livrent les informations personnelles sur les utilisateurs de leur accès Internet, ou qu’ils bloquent l’accès à certains sites ou protocoles. Ces pouvoirs pourraient être étendus, voire transformés en « devoirs », à l’égard de tout intermédiaire qui faciliterait, volontairement ou non, des infractions au droit d’auteur.

On ne croit pas à un seul instant que le pays qui a inventé le Bill of Rights pourrait accepter un tel projet de loi, qui a déjà provoqué la fureur des Libéraux-Démocrates. Mais le gouvernement britannique pourrait entretenir l’indignation, pour mieux faire passer un projet de loi encadré par le Parlement, mettant en place une riposte graduée à la française.

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