Riposte graduée : la France accusée de faire pression sur les députés étrangers
Mise à jour : contrairement à ce que nous avions écrit, Camilla Lingberg est députée du parlement suédois et non pas députée au Parlement Européen. Ce qui rend d'autant plus étrange et inacceptable ce qui se révèle être une véritable ingérence française dans les affaires intérieures suédoises.
On sait depuis longtemps que la France exerce un lobbying très fort sur le Parlement Européen pour qu'il rejette l'amendement Bono du paquet Télécom.
La députée européen suédoise Camilla Lingberg, très opposée à la riposte graduée et farouche défenseur du respect des libertés fondamentales sur Internet, a ainsi révélé lundi avoir été contactée directement par l'Ambassade de France en Suède pour faire pression sur elle. Les émissaires de Nicolas Sarkozy souhaitaient discuter avec elle de ses positions et la convaincre d'accepter que l'accès à Internet d'un abonné puisse être suspendu pour lutter contre le piratage.
"On m'a expliqué que ma position posait problème, et que le projet français de coupure d'accès à Internet était la seule solution valable pour lutter contre le piratage", a expliqué l'eurodéputé, très "surprise" par cette manière de faire. "Je n'ai normalement absolument aucun contact avec l'Ambassade de France et la semaine dernière j'ai reçu un appel de leur part et c'était très urgent", raconte-t-elle. "Ca fait bizarre".
En principe, les ambassades n'interviennent auprès des députés que pour défendre l'intérêt national, pas pour discuter de questions de politique générale européenne. "Ca n'est pas conforme aux bonnes pratiques diplomatiques", constate Christer Jönsson, professeur à l'Université de Lund en Suède, et spécialistes des questions diplomatiques. "S'ils veulent faire des commentaires, ils doivent s'adresser directement au gouvernement et à personne d'autre. S'adresser directement à un parlementaire en personne n'est pas conforme à ce que l'on doit faire".
Interrogé par la presse suédoise, le porte-parole de l'ambassade de France à Stockholm Marc Sevier a reconnu qu'une discussion avait bien eu lieu vendredi dernier entre Camilla Lingberg et le conseiller français Olivier Lacroix. "Mais le but de la rencontre était seulement de recueillir des informations sur la perception dont l'internet devrait être régulé. Nous n'avons pas essayé d'affecter sa vision d'aucune manière", a-t-il assuré.
Inachevée avant les élections sous la pression de la France et d'une poignée d'Etats pro-Hadopi, la discussion sur le Paquet Télécom a repris lundi, pour plusieurs semaines. Outre la riposte graduée, il y sera beaucoup question du respect de la neutralité du net, un sujet autrement plus complexe et fondamental que la simple répression du piratage.