L'UFC conteste le rachat de Neuf par SFR devant le Conseil d'Etat
C'est désormais de notoriété publique, le gouvernement et la majorité présidentielle ne feront rien pour encourager le développement de la concurrence dans les télécoms en France.
C'est donc dans cet esprit et avec cette mission en tête que le ministère de l'économie a donné son feu vert le 15 avril dernier à l'acquisition de Neuf Cegetel par SFR, c'est-à-dire par le groupe Vivendi. L'opération doit permettre à Vivendi de réunir dans une même main des activités d'opérateur de télécommunication mobile et Internet, et des activités d'éditeur de contenus avec Universal Music et surtout Canal+. Elle doit favoriser l'émergence d'un "duopole" national, avec Orange qui dispose déjà de l'ADSL et de la téléphonie mobile, et qui se lance depuis plusieurs mois avec force sur le marché des contenus et de la télévision.
Pour ne pas risquer de couac, Bercy avait soigneusement évité de demander son avis au Conseil de la concurrence. Le procédé semblait ne pas avoir créé de remous, puisqu'aucun des opérateurs concurrents n'avait émis la moindre critique, pas même Free qui se retrouve pourtant fragilisé. Mais les consommateurs et le gouvernement ne partagent pas le même agenda et la même vision industrielle.
Selon les Echos, l'UFC-Que Choisir a décidé de porter l'affaire devant le Conseil d'Etat en contestant la validité du feu vert accordé par les services de Christine Lagarde. S'il donne gain de cause à l'association de consommateurs, le Conseil devra soit annuler l'autorisation de Bercy, soit demander l'avis de la Conseil de la Concurrence. Il peut aussi, bien sûr, débouter l'association et conforter le ministère.
Pour appuyer sa demande, l'UFC pointe un problème de fond (la création du duopole entre France Télécom-Orange et Vivendi), et un problème de forme. Selon l'association, puisque le britannique Vodafone co-contrôle SFR, le droit des concentrations impose que le rachat soit examiné par Bruxelles et non par Paris. Vivendi s'estime protégé par le pacte d'actionnaire qui interdit à Vodafone de donner son avis sur les développements de SFR dans la téléphonie fixe, et donc dans l'ADSL. Mais l'UFC affirme que le pacte a été rompu lorsque le rachat de Neuf Cegetel a été publiquement soutenu par Vodafone.
La plainte devrait logiquement freiner les projets de fusion des marques SFR et Neuf Cegetel, et remettre en question l'intégration immédiate des deux entités, qui doit s'accompagner d'un plan de licenciements chez Neuf.